Cuba
Jolie petite ville de province |
Toute chose est une épreuve. Il faut avoir du temps ici : compter environ deux heures pour acheter un billet de bus, pareil pour retirer de l'argent à la banque. La question entendue fréquemment à ce moment est "ultimo ?" (Dernier ?). Et on passe son temps à attendre ! Les gens dans la queue en profitent pour partir faire des courses, puis reviennent à leur position. Des fois il n'y a que deux personnes avant, et pour une raison inconnue ça prend quand même une éternité !
La vie à Cuba ? C'est très particulier, ce ne sont pas du tout les mêmes repères qu'en Europe. Pour certains aspects on se croirait en temps de guerre. Pour d'autres, dans un pays bien plus développé que nous.
Pour donner une idée, sur les prix très différents ici : une caisse de 24 canettes=30 euros=3 semaines de salaire pour un prof ou un médecin= deux paires de tong=1000 tickets de cinéma = 200 livres de tomates !
En étant européen par là-bas, on suscite souvent la convoitise : beaucoup de gens viennent nous voir (à Santiago). En retirant à la banque, même pour nous la vie est chère, alors pour eux !
La société est à deux vitesses : certains magasins ne sont payables qu'en devise étrangère, privant les cubains des produits importés (pâtes, savon notamment). De même, les transports longue distance sont payables uniquement avec une carte étrangère : sauf condition spéciale, les cubains ne peuvent pas voyager hors de leur région.
Ceci provoque évidemment beaucoup de frustration, et un déséquilibre des monnaies : le dollar s'échange bien mieux à la rue qu'à la banque ( 1$=25 pesos en banque contre 100 dans la rue)
Il y a aussi une répression très forte : j'ai entendu parler de 25 ans de prison pour manifester. Pas de liberté de la presse, seuls deux journaux du parti sont autorisés, et beaucoup de journalistes emprisonnés.
Beaucoup de surveillance aussi : pour un long voyage, pour payer par carte ou pour dormir dans une casa particular (chez l'habitant), il faut donner son numéro de passeport.
Peu de moyens pour tout : des magasins vides, acheter une voiture relève de la réussite d'une vie (elles sont rebricolées de chez rebricolées : la Chevrolet de 1954 prise avec les Suédois avait un moteur Renaud, une boîte de vitesses coréenne, un autre truc d'Inde etc...).
D'un autre côté, l'état aide beaucoup les habitants : des rations alimentaires conséquentes, une électricité à bas coût, des logements très peu chers voire gratuits après l'ouragan de 2012. Ici, tout le monde a un toit : plus ou moins précaire, mais existant.
Pour le travail ? Ce sont deux jours intenses (12h par jour), puis deux jours de repos.
L'accès à la culture est aussi très facile : entre 3 et 5 pesos pour les nombreux musées de la ville, des cinémas, des spectacles : même à Paris une telle concentration de lieux culturels est rare !
La ville est étonnamment propre : bien plus qu'en France, du style de la Suisse. En effet, tout se recycle, du tee shirt troué à la chambre à air explosée. C'est intéressant de voir les différentes habitudes que nous avons : ici jeter un fil électronique est impensable, chaque chose est précieuse.
Peu de voitures, donc peu de bruit en ville : le calme est appréciable ! La ville a un petit air de Venise d'ailleurs dans son rythme, dans les discussions entre les gens.
École : j'ai visité un collège. Ici aussi l'école est obligatoire pour tous jusqu'à un certain niveau. Elle est aussi gratuite. Pour les élèves malades un maître auxiliaire de déplace à domicile pour lui donner cours. Pour les matières, c'est physique, bio, maths, espagnol, histoire, civisme et ateliers techniques. Chaque élève est ensuite libre de continuer vers l'université ou vers la voie pro.
Les gens : comme me l'a bien dit quelqu'un croisé là-bas, Cuba est un pays communiste avec un population de capitalistes ! C'est en tout cas l'image qui en ressort : avec tant de privations, on comprend que l'image d'abondance qui s'affiche sur la télé donne envie, ainsi que toutes les libertés de circuler ou de parole. Beaucoup voudraient s'enfuir du pays.
D'autres en sont fiers. Certains sont allés travailler à l'étranger (ils sont rares), puis sont revenus pour profiter de la vie : là-bas le travail, ici les loisirs.
Il y a étonnamment beaucoup de métisses aux yeux très clairs dans les rues ! Beaucoup de drague dans la rue. Les homosexuels s'affichent assez librement.
De grandes libertés ici, et ce dès les années 60.
Particularité des discussions : accent difficile à comprendre, sans les s j'ai parfois beaucoup de mal. Des envolées chantantes des fois, des "Javiiiiiiiier" prononcés avec toute la gamme de notes possible pour ce seul nom. Une habitude aussi est de siffler dans la rue pour remarquer quelques chose, dire bonjour ou juste comme ça.
Pays de la débrouille : un pneu de camion pour faire un canoë, un vélo avec des vitesses bricolées maison : les Cubains sont très malins et bricoleurs. Et filous parfois, il y a toujours à négocier, sinon on se fait avoir (en tout cas à Santiago, d'autres villes sont plus calmes).
Vie paisible dans les petites villes : très peu de voitures, aucune pub, pas assez d'internet pour geeker (je crois que c'est encore cher car Cuba n'est toujours pas bien relié en câbles) donc tout le monde parle ensemble. Comme la vie s'est faite sans téléphone, pour se retrouver on se donne rendez vous, pour des renseignements on va sur place ou on demande. Tout prend un peu plus de temps, mais ça évite une frénésie du quotidien : je ne sais pas si c'est une vision juste ou simplement celle d'un touriste qui reste pour moins d'un mois, mais j'adore cette ambiance !
En remontant vers le nord et la Havane, la vie est moins dépaysante : plus de voitures, des vélos avec vitesses, les gens viennent moins me parler et n'ont pas cet accent incompréhensible. La vie est un peu plus à l'occidentale ! (Ou bien je m'habitue à Cuba).
Un article wikipédia qui décrit bien le pays aussi : Cuba wiki
Pour le parcours, ça a été d'abord de la survie à Santiago. J'y suis hébergé en toute illégalité par des gens d'un quartier très pauvre. En échange je leur fais des courses pour la nourriture et le savon. Le matin, grosse surprise, en sortant de la douche (donc du seau sur le visage), je me prends une grosse décharge d'un fil qui ressort du mur. Outch !
Quelques images de Santiago ainsi que de quelques cubains rencontrés au passage :
Un pêcheur et son pneu |
Tivoli : le quartier français des immigrés haïtiens : ça parle encore français par endroits ! |
Mon hôte qui me fait visiter la ville |
Des magasins vides |
Je sympathise aussi avec Olivier, un français qui habite Cuba. Il me dit renseigne sur absolument TOUT ce qu'il faut savoir par ici, et m'aide à m'y retrouver, notamment pour les transports ! Je n'étais pas prêt. Ça arrive de recevoir de mauvais conseils en voyage, ou des conseils plus d'actualité. Avec lui, comme je l'ai découvert par la suite, tout était très proche de la réalité ! Le lendemain, on va se balader à trois avec un copain cubain à lui dans la montagne environnante.
Grâce à lui je me lance dans du trafic d'argent (encore pour survivre à Cuba : sans ça la vie est beaucoup trop chère). C'est ce qui est étrange ici : faire des choses illégales est nécessaire pour vivre, et tout le monde le fait !
Un max de thunes ! |
Puis c'est départ en bus de nuit pour Sancti-spiritus. De drôles de personnes arrivent avec manteaux de ski, pantalons et bonnets alors qu'il fait environ 25 degrés. La clim du bus tournée à fond leur donne raison : depuis trois mois dans les Caraïbes c'est la première fois que j'ai froid.
Arrivé dans la ville, ça me plaît beaucoup. Très paisible, pas de bruit dans les rues, beaucoup de chevaux.
Visites de musées, et d'une école au programme.
La bibliothèque |
Visites de musées, et d'une école au programme.
L'une des enseignantes veut absolument me présenter sa fille de 17 ans, pensant que visiter l'école était un prétexte pour trouver "una chica" ! Non non, je voulais vraiment en savoir plus sur l'éducation ici 😅
Le soir, petite balade avec le fils de la famille. Il a mon âge et on a de belles discussions sur les études, la lecture, et bien d'autres domaines. C'est un grand fan de Jules Verne !
C'est le matin que l'aventure commence : j'ai 65 kms à faire en bus jusqu'à Trinidad. Je vais à l'arrêt pour 7h du mat. Là, personne ne sait quand le bus passera, mais tout le monde attend. Une heure, puis deux puis trois... Finalement le bus passe à 14h ! Avec la foule immense, pas possible de rentrer dedans. J'en prend un autre qui s'arrête entre les deux villes. Pas simple.
Puis Trinidad, petite ville mignonne et très touristique : chaque coin de rue cache un français
Le clocher du musée de la lutte contre les bandits (comprendre les contres révolutionnaires) !
D'autres français dans ma casa : on passe une soirée sympa en ville. Ils vont à Cienfuegos le lendemain. Je comptais m'y rendre un jour plus tard pour trouver un bateau pour les Bahamas, mais vues les galères de transport, je saute sur l'occasion et leur voiture de loc ! La route magnifique me fait penser avec nostalgie à mon vélo, bien loin hélas ! Pas de photos, je conduisais et l'état de la route invitait à rester concentré...
Cienfuegos:
Au port où je veux chercher un bateau, on me demande le nom (pas possible d'y accéder si on n'y est pas convié). Au bluff je réponds par le nom du bateau de mes copains de St Martin : je sais qu'il doivent arriver d'ici quelques jours. Surprise : ils sont justement en train de faire les papiers d'arrivée ! Heureux de les revoir ! Je reste avec eux quelques jours à bord.
Noémie et Klems ont dégoté un cours de rumba avec des pros ! Bah on a encore beaucoup à apprendre...Une voiture avec un drapeau communiste aux USA ça marche aussi ? |
Capitole |
Boutique pour touristes |
Réparer sa bagnole : le sport national ici ! |
Finalement je retrouve Roland, Philippe Noémie et Klems qui arrivent quelques jours après moi ! C'est très sympa, on visite et on fait des sorties ensemble. J'irai finalement dans leur casa pour la fin du séjour.
Mon petit doigt me dit que la tondeuse est une invention d'après les années 60 !
Roland le capitaine est un retraité beaucoup moins sage qu'il en a l'air ! En étant passés par là Jamaïque, ils ont fait de petits achats de plantes vertes... Soirée planage avant mon départ !
Départ qui se fait d'ailleurs comme ça :Hé oui, malheureusement j'ai essayé de tout faire pour l'éviter, mais avec des contraintes de temps, de lieu et d'états unis c'était pas facile !
À moitié vide qui plus est |
Je suis maintenant en escale aux îles Caimans, c'est à dire pas du tout sur la route Cuba-Miami (c'est l'avion). Grosses galères du début à la fin, entre la réservation du billet, l'autorisation d'aller aux Etats Unis, la mission impossible pour faire un test COVID à Cuba, la surprise d'une autorisation de voyage nécessaire pour les îles Caimans, le transport pour l'aéroport et le tout quasi sans pouvoir utiliser Internet : c'est plus facile en bateau ! En arrivant je suis de peu refusé sur le territoire car je n'ai pas d'adresse sur l'île, et j'ai une mangue dans mon sac. Je fais louche, les douaniers sont féroces et fouillent de fond en comble mon sac, me demandent pourquoi j'étais à Cuba, ce que je fichais sur un bateau etc... Au final la compagnie prend en charge le taxi, l'hôtel et le repas du soir sans que j'aie rien pu dire. Heureusement, vu le tacos à 18 dollars ça me serait revenu cher ! J'ai l'impression que mon billet était moins cher que le prix de cette escale...
J'en profite pour dire adieu aux Caraïbes ! Demain direction Miami, c'est un peu comme la seconde partie de mon voyage qui commence. À partir de maintenant, je me rapprocherai de la maison : cap au nord est !
Bonus : quelques enregistrements de la vie dans la rue
Trèèèèès heureuse de te retrouver!!! Ainsi, le voyage continue pour nous également :)! Pas encore eu le temps de tout lire, je dois partir à l'école. La journée va être longue en attendant de finir de découvrir tes écrits! J'espère que les retrouvailles avec Duc tout à l'heure seront moins rocambolesques que tes péripéties de départ et d'arrivée aux îles Caïmans! Gros gros Bisous!
RépondreSupprimerQuel bonheur de retrouver notre matelot vadrouilleur préféré !
RépondreSupprimerMerci pour tes photos et commentaires.
Après avoir été le prince du baroud, te voici maintenant le roi des trafics en tous genres.
Nous pensons que tu garderas un grand souvenir de Cuba et que tu y resteras fidel !
Bonne continuation aux Etats-Unis, un très grand bonjour à Duc et à bientôt pour connaître la suite de tes aventures terrestres et maritimes.
Gros bisous de nous deux.
Je reste Fidel à ce pays très différent : pour les habitudes, il en Castro !
SupprimerGros bizous à vous aussi
J'ai A-DO-RE (impossible de trouver la majuscule accentuée grrr). Mon âme de sociologue en herbe y a trouvé bien des choses intéressantes.
RépondreSupprimerQue sont les gros barils bleus sur les toit, des réserves d'eau? Le bleu est un peu une couleur dominante du reste. Merci pour ton partage vocal, avec même une musique en fond.
Merci merci merci !!!
Merci Pascale ! Tout juste, les gros trucs bleus sont des citernes d'eau. Une eau qui donne mal au ventre d'ailleurs...
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